La veuve et l'orphelin

C'est un très vieux souvenir d'école qui remonte au cours élémentaire. A cette époque où la mixité scolaire ne concernait que les enseignants, mon instituteur était une institutrice. C'était l'épouse du directeur qui, lui, assurait la classe de certificat d'études. Chaque soir, avant les tintements de la cloche libératrice, c'était le temps de l'histoire ou plus exactement l'heure du feuilleton. Les quotidiens d'alors offraient à leurs lecteurs, en avant-dernière page, une bande de 5 ou 6 vignettes illustrant les extraits du roman qui était reproduit juste au-dessous.

Madame Delaporte, cette enseignante qui avait su nous captiver, avait découpé ces dessins en noir et blanc, les reliant en une liasse dont elle détachait chaque jour un feuillet pour nous raconter la vie  de Rémi. Le héros d'Hector Malo était dans une telle spirale de malheurs qu'il nous fallu bien l'année scolaire tout entière pour en faire l'inventaire.  

-Tout ça pour dire quoi?

Tout simplement qu'en ouvrant la Nouvelle République de ce lundi 13 octobre à la page de Loudun je me suis retrouvé précipité dans ces souvenirs aux odeurs de blouses grises: "Le jumelage avec Ouagadougou orphelin" 

Rien que ça!

Pour avoir participé à cette assemblée générale extraordinaire, je n'ai pas le sentiment d'y avoir pleuré le perte de parents attentifs et dévoués. J'ai souhaité faire part de cet avis au quotidien qui nous invite à témoigner et apporter des précisions: réagissez, précise-t-il.

Ayant pratiqué la réaction à plusieurs reprises avec des résultats bien souvent décevants, j'ai cru utile de reproduire ci-dessous le document envoyé pour qu'il ne soit pas totalement ignoré si par hasard il échappait à l'encre des rotatives.

Bonjour,

 

La présentation de l'assemblée générale extraordinaire du comité de Jumelage Loudun/Ouagadougou est surprenante.

Comment ça, orphelin?

Quelle idée de titrer ainsi? La situation d'orphelin invite à la compassion, à la commisération. On plaint la victime, on souhaite l'aider ou l'assister. Il n'y a rien de tel ici.La disparition du couple Benas  du paysage Loudunais s'apparente plus à une désertion d'opportunité qu'à l'évolution programmée d'une situation bien structurée. Le maire s'est vu signifier son congé par les électeurs de façon non équivoque et il n'y  pas à revenir la-dessus. Son ingérence dans la vie associative locale, parfois par épouse interposée (office de tourisme, comité de jumelage), n'a eu d'autre conséquence que de créer des tensions, attiser des antagonismes. 

Aujourd'hui, ces associations qu'ils ont abandonnées ne sont pas orphelines mais soulagées. Certes la tâche s'annonce difficile pour un Office de Tourisme qui va devoir retrouver toute sa place dans un domaine devenu a priori communautaire ou d'un comité Loudun/Ouaga, riche de l'inestimable héritage de Jacques Lucas et confronté au difficile pari qu'une bourgade de 7500 habitants puisse aider une capitale en comptant 2 millions. Le challenge relevé par Claude Lavaud n'est pas simple mais son engagement, la détermination de l'équipe qui l'entoure sont apparues sans faille et les adhérents leur ont manifesté unanimement confiance et soutien.

Il doit y avoir d'autres orphelins sur le sort desquels il conviendrait mieux de s'appitoyer.